Le Camp des Milles : Pour ne jamais oublier

Lecture 4 min

Publiée le ven 04/08/2017 - 02:00 / mis à jour le lun 02/08/2021 - 02:00

Il est un lieu en France encore debout qui incarne, hélas on ne peut mieux, l’engrenage mortel des intolérances durant la dernière guerre : l’ancienne tuilerie des Milles, près d’Aix-en-Provence. À peine la seconde guerre mondiale déclarée, en septembre 1939, l’Etat y regroupe les « sujets ennemis » résidant sur le territoire… Sans tenir compte du fait que ces Allemands sont pratiquement tous des antifascistes réfugiés en France.

Parmi ces internés, beaucoup d’artistes et d’intellectuels notoires, qui continueront à créer à l’intérieur même du camp, laissant de nombreux dessins ou peintures sur les murs. Après l’armistice de juin 40, le bâtiment devient, sous le régime de Vichy, un camp de transit rassemblant plus de 3 000 « indésirables » en attente de visas pour l’étranger. Trente-huit nationalités s’y côtoient dans des conditions déplorables, des anciens des Brigades Internationales aux Juifs, hommes femmes et enfants, expulsés du Wurtenberg et du Palatinat. La phase la plus tragique se situe entre août et septembre 1942 : plus de 2 000 Juifs de la région raflés par les autorités de Vichy, femmes et enfants inclus (le plus jeune avait un an), sont regroupés aux Milles en vue de leur déportation vers Auschwitz.

Image
camp des Milles
Le tristement célèbre Camp des Milles, à Aix en Provence.

Un lieu intact

Seul grand camp français d’internement et de déportation intact et accessible au public, le camp des Milles a été restauré et doté d’une muséographie discrète. Il devient aujourd'hui, avec le soutien du Conseil général, un lieu de mémoire vivant résolument tourné vers l’enseignement de la fraternité et du respect de l’autre.

La fonction pédagogique à l’usage des jeunes générations y occupera ainsi une place essentielle, nécessaire pour lutter contre l’engrenage des discriminations, de l’antisémitisme, du raciste et de la xénophobie, « chacun d’entre nous, et les nouvelles générations en particulier, doivent prendre conscience de cette « expérience du pire » afin d’en tirer des enseignements pour aujourd’hui et pour demain » précise Alain Chouraqui, porteur du projet.

Image
L'intérieur du Camp
L'intérieur du Camp

Le Site-Mémorial comprend trois volets dédiés à la connaissance, à l’émotion et à la réflexion, que le visiteur découvre en trois temps, confortés par plusieurs dispositifs majeurs :

Le parcours débute par une présentation de l'histoire du Camp des Milles, de son contexte local, national, européen et mondial. Des bornes audiovisuelles reconstituent les destins individuels d'internés, célèbres ou inconnus ; d'autres présentent le récit de témoins de cette époque. Le but ici étant d'imprégner le visiteur du lieu et de tout ce qu'il s'est passé entre ses murs.

Dans la Tuilerie, le visiteur doit avoir le sentiment d'évoluer dans ce qui fut un camp d'internement abrité par une usine. Vous pourrez aussi visiter différentes salles consacrées aux contextes géographiques dans lesquels cette histoire s'inscrit.

L'exposition portera ensuite essentiellement sur l'histoire des lieux et de ses acteurs : internés, déportés, autorités, Justes parmi les Nations, gardiens, organisations humanitaires.

De nombreux témoignages d'époque refont surface

Pour la première fois en France, les lieux ayant servis à l'internement et à la déportation sont ouverts au public. À l'intérieur du bâtiment principal de la Tuilerie, une scénographie très discrète laissera s'exprimer la force évocatrice des lieux préservés en l'état, et un vaste espace extérieur assurera l'unité et la cohérence des différents éléments historiques et pédagogiques du site.

Après avoir pris conscience du contexte et de la situation, la visite de ses salles est une véritable expérience sensorielle qui ne laisse personne indifférent. Nous sommes ici au cœur de la machine Nazi et la conservation des lieux permet de le sentir.

Image
Affiches d'époque
Affiches d'époque

Enfin, le cœur du camp est le recensement des nombreux témoignages des résidents du camp. Parmi eux, on retrouve des déportés ou des administrateurs du camp. Extrait : « Ce qui était particulièrement douloureux à voir c’était le spectacle des petits enfants. Car des ordres stricts furent donnés en dernière heure tels qu’au-dessus de 2 ans, tous devaient obligatoirement partir avec leurs parents... Des enfants tous petits, trébuchant de fatigue dans la nuit et dans le froid, pleurant de faim... de pauvres petits bonshommes de 5 ou 6 ans essayant de porter vaillamment un baluchon à leur taille, puis tombant de sommeil et roulant par terre, eux et leurs paquets - tout grelottant sous la rosée de nuit ; de jeunes pères et mères pleurant silencieusement et longuement dans la constatation de leur impuissance devant la souffrance de leurs enfants ; puis l’ordre de départ fut donné pour quitter la cour et partir au train ».

Pasteur Henri Manen Aumônier du Camp - « Juste parmi les Nations », devant le convoi du 2 septembre 1942.

Le Camp des Milles est un témoignage de la cruauté de l'époque et met en garde sur les erreurs à ne pas commettre deux fois.

 

Fabien Cassar

Infos pratiques

Ouvert tous les jours de 10h à 19h (fermeture de la billetterie 18h) sauf : les 31/12, 01/01, 01/05, 24/12 et 25/12.

 

Tarifs

Plein : 9,50€

Réduit: 7,50€

 

Site-Mémorial du Camp des Milles

40, chemin de la Badesse

13547 Aix-en-Provence

yellow

Articles les + lus